Combler les lacunes des soins anesthésiques en Guinée 

Pour Marthe Lamah, devenir anesthésiste était le rêve de sa vie. 

« Depuis que je suis petite, j’ai toujours aimé aider les personnes vulnérables », dit-elle – et elle pensait que les patients subissant une opération étaient parmi les plus fragiles de tous. « J’ai tout de suite compris qu’il existait une spécialité où l’on pouvait s’occuper de ce type de personnes munis d’une formation adéquate. » 

Aujourd’hui, Marthe fait partie de la vingtaine d’étudiants qui suivent une formation de soins infirmiers anesthésistes à l’université Gamal Abdel Nasser de Guinée. Devant la salle de classe se trouve le Professeur Joseph Donamou, l’animateur à l’origine de ce programme.  

Ce programme de formation d’infirmiers anesthésistes est le premier du genre en Guinée. Normalement, les étudiants qui souhaitent se spécialiser dans ce domaine doivent trouver les fonds pour aller à l’étranger obtenir leur diplôme. Souvent, en raison du manque d’opportunités dans leur pays, les étudiants, une fois leur diplôme en poche, décident de ne pas rentrer en Guinée. Au fil du temps, cette situation a créé une pénurie de spécialistes capables de dispenser les soins anesthésiques essentiels pendant les opérations chirurgicales.

Un nouveau rêve se concrétise en Guinée 

La situation a commencé à changer lorsque le Professeur Donamou, spécialisé en anesthésie, est monté à bord de l’Africa Mercy® pour un mentorat chirurgical en 2018. La session n’a duré que deux semaines mais a servi de catalyseur au projet.  

Et s’il pouvait reprendre le concept d’un cours de formation, mais en le dispensant sur plusieurs années au lieu de semaines ? Et s’il devenait le fer de lance d’un type d’éducation en Guinée qui permettrait aux étudiants de se spécialiser sans quitter le pays ? 

Il a présenté son idée à ses collègues de Mercy Ships en leur disant : « Il y a un besoin. Concrétisons ce projet. » 

Peu après, le programme de formation des soins infirmiers anesthésistes a vu le jour à l’Université Gamal. Mercy Ships a fait don de manuels et d’équipements de simulation, puis a rénové un espace plus grand pour la formation. 

Les débuts ont été lents, mais très vite, le programme a pris de l’ampleur. 

« Nous avons commencé avec 4 étudiants, puis 5 étudiants, puis 19… et aujourd’hui, nous en avons 23 ».  

Parmi eux se trouvent des infirmières de toute la Guinée, dans le but d’étendre la couverture des soins anesthésiques à tout le pays.  

Le succès du programme tient en grande partie à la possibilité offerte aux étudiants de mettre en pratique leurs connaissances théoriques. 

« Les étudiants font beaucoup d’exercices de simulations en cours et lorsqu’ils arrivent en salle d’opération, ils savent déjà ce qui va se passer. Dans le contexte guinéen, c’est quelque chose de nouveau. Nous avons constaté que lorsqu’un étudiant travaille la pratique et la simulation, lorsqu’il arrive en salle d’opération, il s’adapte rapidement et exécute parfaitement la procédure », explique le professeur Donamou. 

Le champ d’application du programme s’élargit 

Malgré l’expansion du programme de soins infirmiers anesthésistes, le professeur Donamou a constaté une grave pénurie de médecins anesthésistes. Actuellement, 12 médecins anesthésistes seulement dispensent des soins à une population de plus de 13 millions de personnes.  

Dans le passé, ce manque de spécialistes a eu des conséquences mortelles.  

« Les gens étaient formés sur le tas, et la mortalité liée à l’anesthésie était très élevée. Non pas à cause de la chirurgie, mais à cause de l’anesthésie, parce qu’elle était mal faite. De nombreux patients sont décédés parce que l’anesthésie n’était pas bien réalisée », explique le Professeur Donamou. 

Pour répondre à ce besoin et lancer un programme d’anesthésie de cinq ans pour les médecins, le Professeur Donamou a obtenu sa chaire avec le soutien de Mercy Ships. Il est ainsi devenu le tout premier Professeur d’anesthésie du pays.  

Cette année, en plus des 20 étudiants en soins infirmiers anesthésiques, Mercy Ships parraine 8 médecins anesthésistes. Une fois qu’ils seront diplômés, la spécialité actuelle du pays doublera presque, ce qui permettra à un plus grand nombre de personnes de bénéficier de soins de qualité. 

« Nous espérons que dans dix ans, ceux qui auront été formés seront affectés dans les hôpitaux de province et de la capitale afin d’améliorer les soins prodigués aux patients dans les blocs opératoires », déclare le Dr Abdoulaye Touré, Professeur adjoint du programme. 

Les résultats témoignent du potentiel de sauver des vies 

En quelques années, le programme a déjà permis d’obtenir des résultats tangibles en matière de soins chirurgicaux en Guinée. Auparavant, plus de 90 % des césariennes programmées dans le pays étaient pratiquées sous anesthésie générale sans oxygène, et non sous rachianesthésie comme dans de nombreuses autres régions du monde.  

« La conséquence était un taux élevé de mortalité materno-fœtale. En d’autres termes, des mères mourraient à cause de cette anesthésie inappropriée, et des enfants décédaient également. Parmi les femmes venues accoucher par césarienne, beaucoup d’entre elles ont perdu soit leur bébé, soit elles ont perdu la vie », déclare le Pr Donamou.  

Cependant, depuis le lancement du programme en 2019, le Professeur Donamou affirme que « la tendance a commencé à s’inverser » : toutes les césariennes sont désormais pratiquées sous anesthésie rachidienne. Selon lui, cela a permis de réduire considérablement le taux de mortalité materno-fœtale : « Aujourd’hui, il est rare de voir une femme mourir au cours d’une césarienne. » 

Pour Marthe, le rêve va maintenant au-delà du simple travail d’anesthésiste. Elle souhaite relayer ses compétences dans les régions reculées de Guinée, où les besoins en soins spécialisés sont critiques : « La Guinée est ma nation, ma terre. Mon but est d’aller dans toutes les régions pour aider les soignants, en partageant les connaissances que j’ai acquises ici avec les gens qui vivent à l’intérieur du pays ». 

En voyant des étudiants comme Marthe et bien d’autres exceller en classe, le Professeur Donamou estime que l’avenir est prometteur en Guinée. « Je suis très fier de ce qui se passe ici, car nous avons parcouru un long chemin depuis la mise en place du programme. Je sais que l’avenir sera bien meilleur grâce à ce qui se passe ici aujourd’hui ». 

C’est grâce à votre soutien que des programmes d’enseignement de la chirurgie comme ceux-ci sont possibles. Vous voulez voir l’impact d’un partenariat à long terme en action ?  
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